LE ROTARY, OU LE VIRUS DE GUÉRIR

Magazine 856 - Décembre 2024

Décembre est pour le Rotary International le mois dédié à la prévention et au traitement des maladies. Il s’agit de l’une de ses sept causes prioritaires, et celle où les Rotariens consacrent le plus de moyens. Du plan mondial aux initiatives nationales et locales, le Rotary apporte des contributions considérables à la lutte contre les maladies, au point de faire disparaître la polio, reculer le paludisme, progresser la recherche fondamentale sur le cerveau et d’intervenir contre des maladies rares.

Image LE ROTARY, OU LE VIRUS DE GUÉRIR

Les professions de santé sont parmi les plus représentées au sein des clubs et l’on constate que la moitié des actions rotariennes sont consacrées aux questions médicales. Ces implications trouvent un écho favorable auprès du public qui très souvent contribue aux causes défendues.

 

Vers l’éradication de la polio

Lancé en 1985 par le Rotary International, le programme PolioPlus a pour objectif de faire disparaître totalement cette maladie dans le monde. Rejoint par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui en assure la direction, appuyé par de grandes organisations telles que l’Unicef ou la fondation Bill & Melinda Gates, ce programme d’éradication a fait vacciner 3 milliards d’enfants. Si le nombre de nouveau cas a diminué de 99,99% en moins de 40 ans, il en subsiste quelques-uns, en Afghanistan et au Pakistan.

« La polio est l'une de ces maladies oubliées qui est hors de vue et hors de l'esprit », déclare Ramesh Ferris, membre du Rotary club Whitehorse-Rendez-vous, au Canada. Frappé par la polio à l’âge de 6 mois, il sensibilise fréquemment les habitants de son pays , déclaré exempt de polio en 1994, à la nécessité de poursuivre le combat contre cette maladie. Pour cela, il sillonne le Canada à bord de son tricycle actionné par des manivelles afin de collecter des fonds pour l'éradication de la polio. Ramesh a rejoint l'équipe En finir avec la polio, une nouvelle campagne de l'Initiative mondiale pour l'éradication de la polio visant à sensibiliser à l’importance d'éradiquer la maladie. Cette équipe En finir avec la polio comprend des athlètes de plusieurs pays qui, comme Ramesh, ont été directement touchés par la maladie. Tous s'expriment devant les médias et sur les réseaux sociaux et lors d'événements sportifs. « Il est essentiel que les gens réalisent que la polio ne connaît pas de frontières », déclare l'athlète en fauteuil roulant Minda Dentler, qui a contracté la polio pendant son enfance. « Tant que cette maladie existera quelque part, elle constituera une menace pour tous les enfants » précise-t-elle.

De nombreux Rotariens participent à des campagnes de vaccination, comme ce fut le cas ces derniers mois à Madagascar où 300 000 enfants ont reçu les gouttes salvatrices. Les Rotariens malgaches sont intervenus non seulement dans les centres de santé, mais aussi dans des localités peu accessibles. Le pays où les vaccinations sont les plus difficiles est l’Afghanistan, l’un des rares pays où n’existe pas de Rotary club et où l’on continue chaque année de découvrir des nouveaux cas de poliovirus sauvage. Un agriculteur afghan a confié en début d’année qu’il n’avait pas fait vacciner l’un de ses fils au cours de campagnes de vaccination. « Après que Ghafar a été paralysé par la polio, j’ai compris à quel point il était important de vacciner nos enfants contre cette terrible maladie. Aujourd’hui, je le fais pour mes autres enfants dès que j’en ai l’occasion. Je parle aussi aux gens du village, en particulier à ceux qui refusent le vaccin, et je leur explique son importance. Je leur dis que s’ils ne vaccinent pas leurs enfants, ils risquent d’être paralysés comme mon fils ». Françoise Benoît-Cattin, membre du Rotary club Magny-en-Vexin, atteinte de la polio à l’âge de 5 ans, intervient en région parisienne à la demande des Rotary clubs pour parler de la polio et motiver les donateurs au Cercle PolioPlus.

Bien que l’éradication de la polio soit un défi gigantesque, d’autres combats d’envergure sont menés par le Rotary contre des maladies.

 

Une initiative d’envergure contre le paludisme

Chaque année, la Fondation Rotary octroie une seule subvention pour un programme d’économie d’échelle. Dotée de 2 millions de dollars, utilisée sur une période de trois à cinq ans, cette subvention exceptionnelle soutient un programme parrainé par des clubs ou des districts qui a déjà donné satisfaction et qui est prêt à être étendu à d'autres régions. C’est dans ce cadre qu’une subvention a été accordée afin de lutter contre le paludisme (ou malaria) à l’échelle d’un pays d’Afrique. Une subvention pour un programme d’économie d’échelle a été accordée à Partenaires pour une Zambie sans paludisme, projet élaboré par des Rotariens de ce pays. Le paludisme est une maladie évitable causée par des parasites transmis par les piqûres de moustiques infectés. Il s’agit de l'une des principales causes de maladie et de décès en Zambie, comme dans de nombreux pays du monde. Pendant des années, les Rotariens zambiens s’étaient appuyés sur des subventions mondiales de la Fondation Rotary qui ont permis de financer la formation de travailleurs de santé locaux. Des résultats encourageants ont motivé les Rotariens à poursuivre ce programme…sur une échelle élargie. Le programme Partenaires pour une Zambie sans paludisme a remporté l’adhésion de la Fondation Rotary en partie grâce à l’apport financier de World Vision U.S. et de la Fondation Bill & Melinda Gates. Ces deux grandes fondations américaines s’étaient engagées à verser deux millions de dollars chacune, ce qui a réuni six millions de dollars pour ce projet dont l’objectif est de former et d'équiper 2 500 travailleurs de santé locaux en Zambie en vue de renforcer les efforts déployés par le gouvernement pour éradiquer le paludisme dans le pays.

Le Rotary étant implanté dans toutes les provinces zambiennes, ses relais avec la population sont facilités par une parfaite connaissance du terrain et des mentalités. Cette valeur ajoutée est déterminante pour que des fondations extérieures contribuent à un projet conduit par des Rotariens. « Les subventions mondiales et les subventions de district ont connu un grand succès, mais nous voulons donner la possibilité de monter des actions ayant davantage d'impact », explique Sangkoo Yun, administrateur de la Fondation Rotary et membre du comité de sélection des programmes d'économie d'échelle. Pour ce faire, la formation de        2 500 travailleurs locaux de santé, ainsi que de personnels d'établissements sanitaires et de fonctionnaires était indispensable. Ces travailleurs, dont certains ne sont pas rémunérés, disposent des traitements et équipements nécessaires, prennent en charge les patients, préviennent la propagation de la maladie, fournissent d'autres soins de santé, ce qui réduit la charge des dispensaires. Le projet touchera in fine 1,3 million de Zambiens qui, pour la première fois, bénéficieront de soins de santé au sein de leur communauté. Cela se traduit par le dépistage, le traitement et la prévention du paludisme, mais aussi par le traitement de maladies hydriques ou pulmonaires, ainsi que par la diffusion d'informations sur la Covid-19. Il s’agit réellement d’un programme d'économie d'échelle.

Grâce à cette subvention des programmes d'économie d'échelle, les premiers résultats montrent un net recul de la mortalité due au paludisme en Zambie, ce fléau touchant particulièrement les enfants. Actuellement, l’action vise à réduire l'incidence du paludisme de 90 % dans deux provinces.

En France, des clubs du district 1660 agissent à travers  l’action Pasteur-Palu qui, grâce à la Fondation Rotary depuis 2011 permet d’aider financièrement différents Instituts Pasteur dans le monde : après Versailles Parc en 2011 (Niger), Paris Alliance en 2012-2013 (Sénégal), Paris Porte d’Orléans en 2013-2014 (Cameroun), Versailles en 2014-2015 (Cambodge), Paris Concorde en 2015-2016 (Côte d’Ivoire), Versailles Parc en 2017 (Madagascar), Houilles Bezons Sartrouville en 2018 (Guyane), La Celle Saint-Cloud Bougival en 2019 (Centrafrque) et Versailles Parc en 2024-2025 (Niger)

 

Des vaccinations simultanées contre plusieurs maladies

 

Les résultats encourageants enregistrés en Zambie ont conduit au lancement en mai 2024 du   « Défi du Rotary pour des communautés en bonne santé. » Au cours des trois prochaines années, la Fondation Rotary, World Vision et la Fondation Gates contribueront collectivement à hauteur de 30 millions de dollars pour vacciner les enfants de moins de 5 ans non seulement contre le paludisme, mais aussi contre la pneumonie et les maladies diarrhéiques. Ces vaccinations concernent quatre pays d’Afrique : la République démocratique du Congo, le Mozambique, le Nigeria et, une nouvelle fois, la Zambie. Le choix de ces quatre pays a été fait en fonction des ravages de ces maladies, de l'implication des Rotariens et des soutiens gouvernementaux. Dans chacun de ces pays, des Rotariens  travaillent avec des partenaires locaux et les ministères de la santé pour élaborer un plan de mise en œuvre des vaccinations . Les Rotariens sont invités à participer sur le terrain pour faciliter la tâche des agents de santé locaux.

 

Un avenir pour chaque enfant dans le Pacifique

Les pays insulaires du Pacifique Sud sont très éloignés les uns des autres et souvent pauvres.  Ces obstacles ont motivé des Rotariens d'Australie et de Nouvelle-Zélande d'organiser un vaste programme de vaccination dans les îles. Baptisé « Donner un avenir à chaque enfant », ce programme fournit trois nouveaux vaccins à 100 000 enfants dans les îles Cook, Kiribati, Nauru, Niue, Samoa, Tokelau, Tonga, Tuvalu et Vanuatu.  L'Unicef, partenaire de cette initiative, a suggéré que les efforts se concentrent sur la vaccination des enfants à l'aide de nouveaux vaccins contre le rotavirus, les bactéries pneumococciques et le papillomavirus humain (VPH). Le rotavirus, qui provoque des maladies diarrhéiques chez les très jeunes enfants, et la pneumonie figurent parmi les trois principales causes de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans des îles du Pacifique.  

Les Rotary clubs d’Océanie ont collecté près de 4 millions de dollars, dont 1 million obtenu par 23 subventions mondiales de la Fondation Rotary, et 860 000 dollars du gouvernement australien. Ces fonds ont permis de financer bien plus que des vaccins ; ils ont permis d'acheter des réfrigérateurs spéciaux, des conteneurs isothermes pour transporter les vaccins vers les îles. Les ministères de la santé des îles pourront utiliser ces équipements pendant des années.

« Ce programme ne se limite pas à la vaccination de 100 000 enfants », explique Michelle Tanner, membre du Rotary club Matamata (Nouvelle-Zélande) : « il vise à renforcer les systèmes de soins de santé primaires et mettre à jour les politiques et les procédures, notamment en ce qui concerne la tenue des registres ».

Le programme a également permis de former près de 900 agents de santé, répondant ainsi à un besoin essentiel.

 

Le diabète combattu sous toutes les latitudes

Maladie chronique touchant 500 millions de personnes dans le monde, le diabète est combattu afin de freiner sa constante progression. De la prévention au dépistage,  en passant par l’accompagnement des patients, des Rotary clubs s’impliquent dans de nombreux pays.

Au Maroc, des Rotariens professionnels de la santé et plusieurs de leurs confrères consacrent bénévolement une journée à des dépistages auprès de personnes âgées. « Nous sommes convaincus que cette campagne de dépistage aura un impact significatif sur la santé des habitants des quartiers avoisinants »  affirme Khalid Baghri, membre  du Rotary club Casablanca Marina, organisateur de cette action de santé. Une initiative similaire est menée aux Antilles par le Rotary club Cap-Haïtien et son filleul, le Rotaract club Cap-Haïtien. «  Nous avons accueillis près de 300 bénéficiaires au cours de la journée » déclare Blondine-Joseph Metellus, membre du Rotary club Cap-Haïtien qui souligne que « plus de 300 000 personnes vivent dans notre pays avec cette maladie. » De la documentation en français et en créole est distribuée après le dépistage, suivi d’une séance de formation sur la maladie que l’on appelle « la tueuse silencieuse.»

L’une des régions les plus touchées au monde par ce fléau est la Polynésie française qui compte 45 000 personnes diabétiques…soit 22% de la population, alors que la moyenne mondiale est de 6%. Les Rotary clubs de cette communauté d’outre-mer se mobilisent depuis longtemps, à l’instar du Rotary club Papeete qui invite la population à un dépistage à l’entrée d’un supermarché, en partenariat avec l’Association des diabétiques et obèses de Polynésie française. « Le stand ne désemplit pas depuis son ouverture à 7h ce matin » déclare l’un des organisateurs…

L’implication des Rotariens contre les maladies est immense, en témoigne notamment l’opération Rotary Espoir en tête réalisée chaque année en France, destinée à offrir des matériels de pointe à des chercheurs en neurosciences (voir article pages 14-15 de ce numéro).

Un meilleur accès aux soins, des progrès en santé publique à travers le monde réduisent le sentiment d’injustice et contribuent au progrès de l’humanité et, dans bien des cas au développement économique. La santé est facteur de paix.

 

Maladies rares : une amicale en formation

Une amicale rotarienne pour la prévention et le traitement des maladies ultra-rares est en cours de création. Toute personne intéressée peut contacter le Dr Michel Vincent, membre du Rotary club Lyon les Monts d’or : mvincentexpertmed@gmail.com

 

Jetons Cancer, une opération devenue nationale

Collecte de fonds en faveur de la recherche sur la maladie, Jetons Cancer a été initiée par des Rotary clubs du district 1780. Aujourd’hui, des centaines de Rotary et Rotaract clubs participent à cette opération qui a vu offrir dernièrement pour 250 000 € de matériels à des chercheurs.

 

 

TEXTE DE CHRISTOPHE COURJON

 

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