SINGAPOUR : UN ÉTAT COSMOPOLITE POUR UNE CONVENTION MONDIALE

Quelques minutes avant l’atterrissage, vous êtes interpellés par le gigantesque trafic maritime : des centaines de gros navires – pétroliers, méthaniers et porte-conteneurs – se suivent : Singapour est l’un des plus grands ports du monde. Le choix d’une ville pour une convention exige d’avoir un aéroport en lien avec le monde entier, une grande capacité hôtelière (au moins 10 000 chambres réservées pour le Rotary) et un vaste centre de congrès.

Avec sa population d’origine chinoise, malaise, européenne, tamoule et autres, le pays est multiculturel, à l’image du Rotary.

Ce qui frappe à Singapour est la propreté du pays (pas un papier par terre, ni graffitis), l’originalité des gratte-ciel aux architectures élaborées, l’extrême végétalisation de la cité-état. Celle-ci se veut très portée sur l’écologie, mais en contradiction avec la sur-climatisation dans tous les édifices…à commencer par le centre de convention !

Une convention asiatique, un Rotary influencé par les Anglo-Saxon,

Les 2/3 des participants sont des Asiatiques (Inde, Taïwan, Philippines, Japon etc.), ce qui est en phase avec l’évolution des effectifs : le Rotary compte de moins en moins d’Occidentaux, et connaît une forte poussée de ses effectifs en Asie et en Afrique. Toutefois, la gouvernance reste très anglo-saxonne : le président sortant du Rotary International est l’Écossais Gordon McInally, qui avait succédé à la Canadienne Jennifer Jones, et qui cède la présidence à l’Américaine Stephanie Urchick.

La culture écossaise est célébrée de bout en bout de la convention : le président Gordon Mc Inally porte le kilt lors de ses interventions, son épouse Heather – cantatrice de profession – chante l’hymne Flower of Scotland lors de la séance d’ouverture ; le drapeau de la croix de Saint-André (et non pas l’Union Jack) trône en permanence sur la scène. Le spectacle final est animé par le célèbre groupe de musique rock celtique Red hot Chilli pipers, qui allie harmonieusement cornemuses et guitares électriques, encourageant des centaines de congressistes à danser. Mais nous sommes en Asie du Sud-Est, et la tradition des conventions veut qu’une touche culturelle soit de mise, d’où les spectacles de longs dragons rouges parcourant les espaces ainsi que les prouesses des acrobates d’Extrême-Orient. Les nombreux participants asiatiques, souvent vêtus de tenues traditionnelles rappellent où nous sommes. La convention est le moment où l’on fait un bilan de l’action menée, d’où les différents thèmes abordés.

La paix au centre des actions

Les actions des Rotariens du monde convergent vers un but, celui de favoriser la paix. Gordon McInally déclare à ce titre « nous sommes un exemple de ce que pourrait être un monde meilleur : là où les gens trouvent un terrain d'entente au-delà de leurs divisions ainsi qu’un but commun afin de tirer l'humanité vers le haut. Grâce à nos actions, nos efforts humanitaires et notre approche méthodique de la construction de la paix, nous pouvons être les catalyseurs d'un changement positif dans le monde. »

Favoriser l'entente est un thème central, illustré par la célébration du 25^e anniversaire du programme des Centres du Rotary pour la paix. Ces études sont offertes à des candidats de niveau Master dans sept universités réparties sur les cinq continents ; le but est de former pendant une année à la résolution des conflits des jeunes qui seront plus tard diplomates, journalistes, ou responsables d’organisions internationales. María Antonia Pérez, diplômée de la paix, déclare en séance plénière que « croire en la paix, c'est avoir de l'espoir, et pour cela, il faut être à la fois obstinés et optimistes, être désireux de persévérer et d'avoir un impact. » 

Un 8^e Centre du Rotary pour la paix sera ouvert en 2025 à Istanbul, une conférence présidentielle du Rotary sera organisée dans cette ville à cette occasion ; elle réunira Rotariens et société civile dans le but de promouvoir les efforts réalisés par les Rotariens pour rapprocher les peuples. Agir pour l’environnement est l’une des contributions qui favorise l’entente entre les humains.

L’environnement : des exemples concrets

Les participants de cette convention étaient invités à visiter une réalisation environnementale des Rotary clubs de Singapour. La restauration d'une vaste mangrove, réalisée en partenariat avec l'Institut technologique de la ville et le Conseil des parcs nationaux de Singapour se traduira prochainement par la création d'un centre de conservation des mangroves et la plantation d’autres espaces dans la cité-état. « Les mangroves stockent davantage de carbone que les autres types de forêts et protègent les communautés côtières des tempêtes intenses et de l'érosion » commente un Rotarien singapourien.

Une séance plénière est animée par le naturaliste Nacho Dean, ainsi que par Claire Chiang, fondatrice de la chaîne hôtelière internationale Banyan Group. Les deux intervenants plaident pour une Responsabilité sociale des entreprises (RSE) plus affirmée afin de protéger l’environnement. Nacho Dean est un globe-trotter connu pour avoir parcouru 33 000 km à pied et nagé dans la plupart des mers et des océans. Il a contemplé des paysages merveilleux, mais aussi de nombreux endroits abimés par la civilisation, le changement climatique, la disparition d’espèces végétales et animales. Le lien entre la santé de l’environnement et celle des humains est indéniable. « Les conséquences du changement climatique, de la pollution sonore, atmosphérique et chimique nous affectent non seulement physiquement, mais elles ont également un impact sur notre santé mentale » déclare-t-il.

La santé mentale a motivé les clubs

Au cours de son mandat, le président Gordon McInally avait demandé aux clubs du monde d’agir en faveur de la santé mentale, souvent considéré comme le parent pauvre de la médecine. « Nous pouvons lutter contre la stigmatisation qui nous pèse lorsque nous voulons demander une aide, a-t-il ajouté. Nous pouvons avoir un impact positif en améliorant les moyens, les compétences, les institutions et les systèmes qui garantissent l'accès à des soins de qualité à un prix abordable ». Le président 2023-2024 du Rotary International félicite les milliers de clubs qui ont réalisé une action en faveur de la santé mentale au cours de cette année. Il rappelle que nombre d’entre elle ont bénéficié du soutien de la Fondation Rotary à travers des subventions. La Fondation agit dans les sept causes prioritaires (anciennement axes stratégiques) du Rotary et soutient les clubs dans leurs projets aboutis.

Le développement économique local soutenu par la Fondation

La plus importante de toutes les aides apportées par la Fondation Rotary est la subvention des Programmes d'économie d'échelle, dont le montant atteint 2 millions de dollars. Elle concerne une seule action d’envergure par an, dont la pérennité est assurée en faveur d’une population tout entière, en collaboration avec des communautés locales et des partenaires qui mettent à profit leur expertise. La subvention octroyée pour 2024-2025 soutient le programme « Partenaires pour l'accès à l'eau et de meilleures récoltes en Inde », dont le but est d’accroître les nappes phréatiques, à étendre les cultures et à augmenter les revenus de 25 à 30 % pour    60 000 agriculteurs. Barry Rassin, président sortant du conseil d’administration de la Fondation Rotary, explique ce choix : « les agriculteurs indiens sont les garants de la production d'une grande partie du blé, du riz et d'autres denrées alimentaires de base dans le monde, mais les nappes phréatiques dont ils dépendent sont en train de disparaître.  Nous travaillerons avec des agriculteurs indiens dans le cadre d'un programme quinquennal visant à jeter les bases d'une agriculture durable en Inde pour les générations à venir. »

Le programme soutenu par la Fondation Rotary construira des systèmes de collecte d'eau de pluie, comme des barrages et des étangs, afin d'accroître le niveau des nappes phréatiques de 10 à 15 % chaque année dans quatre États indiens. Il s'efforcera également de réduire l'érosion des sols sur plus de 4 000 hectares de terres en introduisant l'irrigation au goutte-à-goutte et en plantant des espèces locales et des arbres fruitiers. Cela permettra de compenser les effets du changement climatique et de favoriser les pratiques agricoles durables.

Des ateliers thématiques

En dehors des séances plénières réservées aux grandes présentations, conférences, et compte-rendu généraux de l’année rotarienne écoulée, des ateliers en groupes restreints sont proposés sur différents thèmes. Ces ateliers permettent à chacun de s’exprimer, de confronter des expériences et de trouver des partenaires pour de futures actions internationales. Des ateliers sont notamment consacrés à la création de clubs, aux actions d’adductions d’eau, à la lutte contre l’illettrisme, y compris dans les pays économiquement avancés. Il s’agit d’une vaste ressource et d’un moyen de lier connaissance facilement. Ces ateliers reflètent l’action des clubs et les perspectives souhaitées.

Des conventions lointaines

La parfaite connaissance de l’anglais n’est pas un obstacle pour participer à une convention car des traductions simultanées sont proposées ; une innovation a été lancée à Singapour avec l’utilisation de l’Intelligence artificielle pour de l’interprétariat simultané.

Pour l’immense majorité des Rotariens francophones, se rendre à la convention exige un long déplacement. En effet, aucune ville d’Europe ou d’Africaine n’a été choisie pour la décennie 2020, et l’on constate une prédominance des candidatures déposées par des villes d’Amérique du Nord et de la région Pacifique. La prochaine convention se tiendra au Canada, à Calgary du 21 au 25 juin 2025. Ce pays, dont le français est l’une des deux langues officielles, est prêt à vous accueillir.

Les conventions à venir

21 au 25 juin 2025 – Calgary

13 au 17 juin 2026 – Taipei

 5 au 9 juin 2027 – Honolulu

Rotary Mag toujours présent !

Célébrant les 100 ans de la presse rotarienne francophone, Rotary Mag accueillait à la Maison de l’amitié tous les participants de langue française. Le stand de votre magazine est en effet chaque année le point de rencontre des francophones, lesquels se retrouvent le mardi soir à sa réception. 350 personnes, issues de 24 pays, se sont rencontrées au cours de cette réception et ont échangé…sans interprétariat.

TEXTE DE CHRISTOPHE COURJON