GORDON MCINALLY, PRÉSIDENT 2023-2024 DU ROTARY INTERNATIONAL
Le nouveau président est un dentiste écossais passionné de rugby, devenu Rotarien à l’âge de 26 ans. Gordon McInally encourage les clubs à s’investir sur les questions liées à la santé mentale, tout en poursuivant les buts traditionnels du Rotary International. Par son thème « Créons de l’espoir dans le monde » il invite les Rotariens à s’impliquer pour un monde meilleur.
Un joueur de cornemuse entraîne le futur président du Rotary International et ses amis pour un banquet au son du célèbre Scotland the Brave. Vêtu d’un tartan bleu, vert, noir et jaune, Gordon McInally porte fièrement un plateau de haggis.
Nous sommes le 25 janvier, et comme chaque année, l’Écosse fête la Burns’ Night en hommage à son plus grand poète, Robert Burns. Tous les Écossais se rassemblent alors autour d’un traditionnel haggis accompagné de navets et de pommes de terre, dans une ambiance de musique, de chansons, de poèmes déclamés avec passion, et d’un bon whiskey. Un événement immanquable que Gordon célèbre avec des amis à Galashiels, près de son village de Yetholm. Heather, son épouse depuis 42 ans, porte une ceinture en tartan vert, bleu et rouge créée pour la convention internationale du Rotary de 1997 à Glasgow. Ancienne chanteuse d’opéra et professeure de musique, elle fredonne les chansons de Burns apprises enfant.
Une culture écossaise
Le haggis est un plat à base d’abats de mouton – cœur, foie et poumons – hachés avec des oignons, de l’avoine, du suif, du sel, du poivre et des épices, puis mélangés à du bouillon. Selon la recette originale, les abats sont ensuite bouillis dans la panse préalablement lavée de l’animal. Si la recette est peu ragoûtante, les McInally ont su faire partager ce plat traditionnel dans la communauté rotarienne au fil de leurs voyages.
Gordon a grandi à Portobello, un quartier balnéaire d’Édimbourg réputé pour sa plage de sable clair . Sa mère possédait une crèche, et son père travaillait pour la maison Macdonald & Muir qui produit les whiskies Glenmorangie. Le rugby, passion de Gordon et de Ian, son jeune frère aujourd’hui décédé, a tenu une place centrale dans l’enfance des deux hommes.
Gordon et Heather se connaissent depuis l’adolescence, mais c’est au cours d’un voyage à Florence avec une chorale à laquelle participaient leurs lycées respectifs que leur idylle s’est épanouie. « Nous sommes indépendants et avons nos propres activités », explique Heather. « Même au Rotary. Je suis membre du club passeport de Borderlands [un club satellite du club de Selkirk] et Gordon est membre du Rotary club South Queensferry. Nous avons toujours fonctionné ainsi, notamment à cause de nos engagements professionnels qui nous poussent dans des directions différentes. Mais tous les soirs, nous nous racontons notre journée. »
Le couple a deux filles, Rebecca et Sarah, et deux petites-filles, Ivy et Florence. Gordon décrit Heather comme une femme extrêmement chaleureuse et tolérante qui l’a beaucoup soutenu au fil des ans.
Après son mariage à Édimbourg, Gordon a quitté l’Église méthodiste pour rejoindre l’Église d’Écosse. Il en est aujourd’hui l’un des administrateurs, et a occupé plusieurs fonctions au sein du presbytère et de la paroisse. « Mes parents nous ont appris à nous soucier des autres, à être bienveillants. Un sentiment qui ne m’a jamais quitté, explique-t-il. Grandir dans une famille très croyante a eu un impact certain sur mes choix de vie et ma carrière, de même que ma foi profonde. »
Un dentiste Rotarien dès l’âge de 26 ans
Gordon a dirigé un cabinet dentaire à Édimbourg pendant plus de trente ans, jusqu’à sa retraite en 2016. Il a été enseignant, examinateur et président de la British Paedodontic Society (aujourd’hui British Society of Paediatric Dentistry). Une fois à la retraite, le couple s’est installé dans les Scottish Borders : « Nous savions que nous voulions retourner dans les Borders d’où nous sommes tous deux originaires, raconte Gordon. Ma mère est née dans une famille d’agriculteurs à une quinzaine de kilomètres d’ici. Un retour aux sources en quelque sorte ! »
Gordon a 26 ans lorsqu’il rejoint le Rotary club South Queensferry à l’invitation d’un ami agriculteur qui fréquente la même église. « Au début, je considérais mon club comme un moyen de rencontrer des amis et d’agir pour ma commune et la société dans son ensemble. Au fil du temps, j’ai pris la pleine mesure du travail accompli par le Rotary dans le monde. Je n’allais plus le quitter ! »
Il a été gouverneur de district en 1997-1998 et a célébré le centenaire du Rotary en 2004-2005 alors qu’il était président du Rotary en Grande-Bretagne et en Irlande (RIBI).
Engagé dans des missions en Afrique
Peu avant d’assumer ce poste, Gordon s’était rendu au Rwanda pour aider des enfants devenus orphelins suite au génocide de 1994. Il s’était rendu aussi en Afrique du Sud lors de l’épidémie de VIH/sida. L’autre volet de sa mission consistait à développer le partenariat entre le RIBI et l’association Hope and Homes for Children, alors opérationnelle dans les deux pays. Il s’agissait d’apporter des vivres, des abris et des médicaments, mais aussi une éducation pour assurer un avenir durable aux enfants. Gordon parraine l’association, qui soutient le gouvernement rwandais dans la mise en place d’un système national de protection des enfants et des familles.
Le travail de Gordon s’est ensuite élargi au Kenya, notamment à Nyumbani un éco-village qui accueille des orphelins avec leurs grands-parents tuteurs. Gordon s’y est rendu juste avant la pandémie de COVID-19 pour effectuer des examens dentaires et rénover des logements dans le cadre d’une action montée par des Rotariens écossais.
Déterminé à sensibiliser aux maladies mentales
Contrairement à son frère, Ian quitte le giron familial après ses études d’informatique et s’installe à Londres. Puis il rejoint le Rotaract et se marie. Les deux familles se revoient régulièrement, sans que Gordon ne se doute que son frère souffre de dépression, ou « black dog » comme l’appelait Churchill. Ian a mis fin à ses jours le 8 février 2014.
Ce moment a bouleversé la vie de ceux qui aimaient Ian, et bien des questions restent à ce jour en suspens : Pourquoi ? Quels signes avons-nous ratés ? Qu’aurions-nous pu faire de plus ?
Gordon a relaté cette expérience personnelle dans son discours de l’Assemblée internationale ( école de formation des gouverneurs) à Orlando en janvier ; la première fois qu’il évoquait le suicide de son frère en public. L’émotion l’avait submergé pendant la répétition : « Ce discours fut difficile, mais j’ai enfin réussi à parler de Ian sans m’effondrer. »
En s’ouvrant sur cet épisode douloureux, Gordon ne cherchait pas à susciter la sympathie, mais plutôt à sensibiliser sur la question de la santé mentale. « Les gens comprennent ainsi pourquoi ce sujet me tient tant à cœur. Beaucoup de personnes m’ont ensuite dit combien mon histoire ressemblait à la leur », raconte-t-il.
L’année dernière, Gordon est devenu ambassadeur de l’association Bipolar UK, qui a forgé un partenariat avec le RIBI. Il se sent particulièrement concerné par le thème de la bipolarité et a voulu soutenir l’organisation en animant un webinaire sur la prévention du suicide et en produisant une vidéo sur la maladie.
La santé mentale figure parmi ses priorités de président : « Mon appel à l’action vise à réduire la stigmatisation liée à la santé mentale, à aider les personnes concernées à accéder à des soins de qualité et à les soutenir tout au long de leur chemin vers la guérison. »
Une autre occasion pour Gordon de mettre en pratique, au travers du Rotary, sa philosophie de vie personnelle.
Un passionné de rugby
Le club de rugby de Kelso organise un tournoi contre le club de Gala dans la Tennent's National League Division 1. S’il est une passion commune aux habitants des Borders, c’est bien le rugby. La région peut s’enorgueillir d’avoir produit quelques-uns des meilleurs rugbymen d’Écosse, dont plusieurs ont défendu les couleurs de la célèbre sélection des Lions britanniques et irlandais.
L’un de ses amis , ancien policier, saisit l’occasion pour approcher le président du RFC de Kelso, et lui proposer de rejoindre le nouveau Rotary club passeport des Borderlands. « Il connaît l’impact qu’a le Rotary dans cette région, mais il appréciera davantage la flexibilité du club passeport. Pas de réunions hebdomadaires, ni de repas. Nous nous réunissons peut-être une fois par mois autour d’un café et d’un scone pour monter des actions. Nous sommes ici pour agir, pas pour discuter. Notre but est que le Rotary soit actif et attractif » explique l’ancien policier.
Gordon approuve la démarche : « C’est un Rotary flexible, tourné vers l’avenir. »
Autour de la table, on ne peut que constater l’admiration générale pour l’homme qui va devenir président du Rotary International, le deuxième Écossais et le sixième Britannique.
Gordon était troisième ligne et numéro 8 dans son équipe de rugby ; « une carrière prometteuse interrompue par un manque cruel de talent », avoue-t-il.
Le rugby occupe une place importante dans la vie de la famille. L’ancien cabinet dentaire de Gordon se trouve à quelques encablures du stade de rugby de Murrayfield. L’une des conditions qu’il a imposées à la vente de son cabinet en 2016 était de pouvoir s’y garer lors des matchs internationaux de l’équipe écossaise.
Heather se souvient d’un match au stade de Kelso où les caméras de télévision ont zoomé sur sa fille Sarah, alors petite, qui accompagnait Gordon. « Et bien, ils commencent jeunes dans les Borders ! » s’est exclamé avec emphase le légendaire commentateur de la BBC, Bill McLaren.
Depuis la nomination de son mari, Heather raconte incrédule « c’est un tel honneur. Nous rencontrons des chefs d’État, visitons des lieux exceptionnels. Pourtant, nous venons d’un petit village écossais de 500 habitants et nous nous retrouvons ici à représenter le Rotary International. »
Heather reconnaît être extrêmement fière du parcours de son mari : « Mais s’il vous plaît, ne lui dites pas ! »
TEXTE DE DAVE KING
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